Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
352                           BIBLIOGRAPHIE.

main par les sociétés secrètes et la presse rouge pour qu'il puisse échapper
aux fléaux qu'on voudra périodiquement déchaîner contre lui. A chaque
signal qui partira de Londres, de Berlin, ou simplement de Paris, Lyon
prendra les armes et offrira des victimes en holocauste aux maîtres qui
l'étreignent et le dominent.
   Lyon sera toujours prêt à dire à la démagogie : Morituri te salutanl.
   Comment vit-on dans cette atmosphère plus redoutable que l'air de la
Vera-Cruz ou de Siam ? comment ne fuil-on pas une contrée où règne le
vomil.o negro et où les thugs vous coudoient? comment le commerce,
l'industrie, la propriété même ne s'éloignent-ils pas d'une cilé où ils sont
si latalement menacés? On y reste, on y vit, comme les h.ibitants de
Catane au pied de l'Etna, comme ceux de Porlici au milieu des cendres
«l'Herculanum. On y a son cœur, ses souvenirs; qu'importe la mort ! et
puis, qui sait ? on espère que le fléau sautera une génération et que s'il
éclate il vous épargnera vous et les vôtres.
    Le 27 avril, sur un ordre venu d'outre-mer, la Buire se mettait en
grève.
    Le 30, on faisait des élections et deux arrondissements donnaient la
 majorité à quelques hommes intelligents et Courageux. Le soir, on se bat-
tait à la Guillotière. Le lendemain, sur la proposition du citoyen Despei-
gnes, tous les conseillers municipaux donnaient leur démission, même les
absents, et le dimanche suivant, les hommes d'ordre étant à la campagne,
 la liste conservatrice faisait naufrage, la bourgeoisie était évincée et le
pouvoir retombait entre les mains des Barbecot et des Bouvatier.
   Les Baudy, les Chcpié, les Jacqui , dont les noms seront désormais cé-
lèbres, sont pourtant restés sur le carreau. Les ateliers de cordonnerie
ont dû quitter l'Hôtel-de-Ville.
    Depuis lors, on a désarmé les quatre bataillons de ia Guillotière et, dans
les régions travailleuses, on commence à reprendre courage et espoir.
   — Le premier numéro du Journal de Lyon a paru le 15 mai.
   — La mort qui avait frappé nos plus grandes, nos meilleures familles
lyonnaises, ne s'est pas arrêtée Le 30 avril, un bibliophile connu de
l'Europe savante, M. Nicolas Yemcniz, chevalier de la Légion d'honneur,
consul de Turquie, membre de la Société des Bibliophiles français, suc-
combait , à l'âge de 88 ans, après une carrière toute brillante d'honneur
et de vertu.
   On se souvient de cette bibliothèque, orgueil de notre ville, que
M. Yemcniz avait créée avec tant d'intelligence et de soin. Les éditions
rares, les manuscrits précieux, les reliures des maîtres faisaient de cette
collection une des premières et des plus célèbres. On disait : La Biblio-
thèque Yemeniz avec le même respect que BiHiothbque Çhâleaugiron,
lïosny ou La Bédoyère ; le catalogue, imprimé chez Louis Perrin, conserve
seul le souvenir de ces richesses dispersées en 1886.
   Le salon de M. Yemeniz était un des rares salons où l'on sût causer.
C'était un honneur d'y être admis.
   Aujourd'hui grandes maisons, grands caractères, tout disparaît, tout
s'efface. Après tout, pourquoi regretter nos illustrations ?
   Autrefois on confiait le sort de la cité aux lumières désintéressées des
Terme, des Prunelle, des Lacroix-Laval, des Bambaud. Aujourd'hui on
n'a plus besoin de grands citoyens. On voit qu'on peut parfaitement s'en
passer.                                                     A. V.

               Lyoa. i np. X \.IVÈ VINGTiUiS'Iïïîi,directeur-gérant.