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UN MARIAGE SOUS LES TROPIQUES. 335 minia et son enfant, car je tremble chaque soir qu'elle ne s'évade pendant la nuit ! Nous avons éloigné Rodolphe pour une dernière épreuve ; elle est complète aujourd'hui et le père doit revenir pour essayer son autorité sur cette femme que rien n'a pu faire plier. On écrivit à Rodolphe de se hâter. L'abîme qui s'était creusé entre sa femme et ses parents se faisait chaque jour plus visible et ne se couvrait à la surface que par la condescendance absolue du comte et delà comtesse. Her- minia avait le flair du sauvage et, comme la grossesse n'était plus un prétexte à cette indulgence, elle soupçonna un pièg-e et, sans se rendre un compte exact des inten- tions qui avaient amené ce changement, elle redoubla d'impertinence et chercha à déchirer le voile de ce calme qui l'irritait et l'effrayait à la fois. Son parti était pris et elle se sentait assez forte pour vaincre dans cette dernière lutte. Elle ne voulait de Rodolphe qu'autant qu'il s'humi- lierait, qu'il resterait à Chirimayo et que ses parents re- tourneraient enHong'rie. Dans le cas contraire elle était sûre de trouver une retraite où elle pourrait défier les re- cherches de son mari. De leur côté, M. et Mme de Czernyi ne restaient pas inactifs. Ils espéraient que Rodolphe déciderait Herminia à le suivre, ou si par impossible elle s'y refusait obstiné- ment, il ne pouvait entrer dans leur esprit qu'il laissât son enfant. Mais, ainsi que le disait Wilhelmine, le départ devait suivre instantanément le consentement, car le moindre choc entre les époux pouvait amener cette dispa- rition qui causait sa terreur. Or, étrangers au pays, mis en suspicion par les intri- gues des Fleming, n'ayant pas un ami, pas un conseil, ils se sentaient arrêtés par une foule de difficultés presque in- surmontables. Dans une région civilisée, où les commu-