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LES CHASSEURS DE RENNES. 313 tites pattes de mouches drues et serrées qui constituent assez généralement l'écriture des savants. — Qu'est-ce que cela ? m'écriai-je en lisant le titre : L'harmonie à l'époque quaternaire. Je croyais, docteur, qu'en ces temps de misère, les hommes passaient leur vie à s'entre-dévorer ; que, par conséquent, la discorde et non l'harmonie devait régner en souveraine. —Vous n'y êtes pas ! il s'agit de l'harmonie dans le sens musical du mot, — Ah ! bah ! alors c'est un traité de la musique fossile queje tiens entre mes mains. Mais où diable avez-vous trouvé cela ? Etait-ce par hasard écrit en caractères in- connus sur un de mes tibias de cheval? — Si vous riez, rendez-moi mon manuscrit. — Je serai sérieux. Le docteur continua : — En lavant les phalanges de rennes que vous m'avez apportées, je m'aperçus que plusieurs d'entre elles étaient percées d'un trou vers l'articulation métatarsienne. J'eus l'idée d'approcher le trou de mes lèvres, d'y souffler comme dans une flûte, et je découvris que le petit os ren- dait un son clair, net et perçant. Renouvelant l'expé- rience, je constatai que chaque phalange donnait une note différente, Alors, à force de tâtonnement, j'arrivai à classer mes sifflets par séries de quatre qui toutes for- maient l'accord parfait. — Merveilleux! — C'est une trouvaille cela ! hein ! mais qui après tout n'a rien d'étonnant. J'ouvris les yeux comme deux points d'interrogation. — Et oui certainement. La Bible ne nous apprend-elle pas que, longtemps avant le déluge, un descendant de Caïn, Jubal,inventa la musique? Pourquoi alors n'aurait-