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304 LES CHASSEURS DE RENNES. fants, au nombre d'une vingtaine de personnes, arrivè- rent auprès de moi et s'arrêtèrent sans paraître s'aper- cevoir de ma présence. On déposa le mort à mes côtés ; chacun des assistants jeta auprès de lui un quartier de viande, puis des pierres, des fragments de silex, des os et des cornes qui me parurent être des bois de cerf. La cérémonie se termina par une danse fantastique, une vraie danse d'ours accompagnée de cris effroyables qui auraient dû réveiller le mort. Je suivais tous ces incidents avec une curiosité voisine de la stupéfaction. Mais quel fut mon effroi quand je vis les hommes rouler vers l'abri que j'occupais, un énorme bloc de rocher, évidemment destiné à en fermer l'entrée. Incapable de faire un mou- vement ou même de crier, j'allais être enterré vivant avec un cadavre inconnu, et dans des circonstances que ma faible raison était impuissante à expliquer. Je vis le rocher s'avancer lentement; bientôt il masqua complète- ment l'entrée de ma funèbre retraite et je me trouvai plongé dans l'obscurité la plus complète. Les gens s'é- loignèrent et le silence se fît. La terreur m'arracha un suprême effort et bien m'en prit. Le jour revint : Les pampres se doraient au soleil au pied des rochers; les toits du village brillaient au-dessous de moi ; la campagne avait repris son aspect ordinaire ; la Saône coulait limpide à travers ses vertes prairies et le Mont-Blanc étincelait à l'horizon comme un diamant dans le ciel bleu. III Mon rêve, je devrais dire mon cauchemar, était fini. Il ne me restait plus qu'une fatigue extrême et un ser-