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UN MARI.VCK SOUS LES TROPIQUtS. 239 tère qui est tout, et non seulement Dona Herminia n'est pas belle mais c'est l'esprit le plus infernal de la province ! —Ma chère, disait une troisième, je conviens avec vous qu'on peut se passer de beauté, et vous ave/, raison de croire que la bonté du cœur y supplée ; mais j'ai connu des filles laides et passablement difficiles, que l'éducation avait rendues presque jolies et tout à fait raisonnables. C'est l'éducation, senoritas, qu'un homme doit rechercher d'a- bord, et quelle culture a pu recevoir Dona Herminia avec un père toujours aux champs et une mère qui ne s'occu- pait pas d'elle? Ah ! querida condesa! Nous vous plaignons toutes du fond de notre âme ! un si beau jeune homme ! il n'y a eu qu'un cri dans Salta à cette nouvelle ! Pendant ce colloque entre femmes, M. de Czernyi, dans un coin de l'appartement, subissait de la part des maris un autre interrogatoire. — Vous croyez donc les Fleming riches, lui disait l'un, détrompez-vous, le général vit de sa solde et n'a rien de plus. — Pourtant — On vous a abusé, cher comte, ajoutait un autre. Fle- ming est bien connu de ma femme, qui a des parents dans le pays; il a en effet beaucoup de terrains en surface, seu- lement ces immensités sont improductives et, par dessus le marché, disputées pour la plupart. Les parties lésées se taisent aujourd'hui parce que le général n'a que peu d'an- nées à vivre et qu'on craint sa femme, une vipère dont la morsure est mortelle ! Mais laissez partir le vieux Fle- ming et vous verrez des procès s'abattre sur cet héritage comme les condors sur une mule morte dans la quebrada. En moins de rien tout sera dévoré, et votre fils n'aura de clair là dedans que la sotte compagne qu'il s'est choisie ! •