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                     HUGO ET VAQUERIE.                   173

    Mais je trotte, je trotte, ou plutôt nous trottons, deux
 à deux, quatre à quatre, y compris nos mulets, mon
 compagnon de voyage et moi, sur l'étroit sentier du
 ravin tortueux et boisé qui relie Bagnères-de-Luchon et
 le val du Lys.
    L'excellent abbé Dauphin, si connu et si aimé, mon
 ancien supérieur du collège d'Oullins, près Lyon,m'avait,
 en ce mois de vacance, et au bout d'une année de dure
 épreuve, au grand séminaire de Eennes, en Bretagne,
généreusement invité à venir prendre avec lui quelques
semaines de repos et de poésie dans cette délicieuse,
quoique mondaine Thébaïde, de Luchon. Nous nous y
étions nichés, sous les bois, cachés sous le toit d'un
chalet coquettement et nouvellement construit à l'extré-
mité déserte du cours d'Etigny. Du reste, on allait
entrer dans l'arrière-saison, le beau monde, cette vilaine
lèpre des beaux sites, commençait heureusement à s'é*-
couler et à disparaître. Les croupes sauvages des monts,
secouant peu à peu les petites dames et les grands mes-
sieurs qui pullulent à leurs flancs au soleil de l'été, re-
prenaient, sous l'âpre souffle des solitudes et avec la
mélancolie des teintes automnales, leur air de pacifique
et placide majesté. Nous étions presque seuls aux tour-
nants des promenades et aux retraits des fontaines, aux
rives des lacs, comme aux cimes des glaciers. Souvent
même nous nous aventurions, sans guide, dans les plus
pittoresques excursions, nous franchissions, nous esca-
ladions, d'instinct, avec les chamois ou les aigles, les
cols et les ports de cette magnifique frontière de la
France et de l'Espagne. Pour nous, plus de Pyrénées
et, de l'un à l'autre versant,en deçà comme au delà nous
connaissions la vérité ou Verreur de chaque défilé... Tan.
tôt suivant la pente des torrents, tantôtremontantleplides