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                        AUTOUR DE LYON.                       153
même temps donc, et sans nous être concertés, nous l'assurâ-
mes qu'il était le bienvenu. Mon vieux camarade même, lieu
reux de rencontrer un auxiliaire, lui tendit cordialement la main,
puis, en peu de mots, le mit au courant du 1 ut de notre \oyage,
du sujet de notre entretien et de la divergence de nos opinions
linguistiques. Le traître , qui se sentait raffermi par l'irruption
 de ce tiers, se garda bien de lui parler de sa conversion récente.
   — A merveille ! s'écria le natif du Puy-de-Dôme, au moins je
 ne serai pas seul dans la lutte que je vais engager.
   — Je m'explique parfaitement, crus-je devoir lui répondre,
que mon ami fasse peu de cas des études celtiques : son amour
passionné du latin en a fait un linguiste exclusif. Chez vous,
Monsieur, le sentiment de répulsion dont ces malheureuses étu-
des sont la victime, et la victime innocente, paraît tenir, per-
 mettez-moi de vous le dire, à une autre cause. On croirait, à
 vous entendre, que vous leur gardez rancune pour quel iue of-
fense personnelle.
   — Votre observation, Monsieur, n'est pas dénuée de fonde-
 ment. Lorsque, il y a quatre ans, je me mis à étudier la botani-
que, je ne me proposais pas uniquement de m'initier à la con-
 naissance des plantes, je prétendais encore, naïve à ce point
était mon ignorance, rapporter à la flore actuelle la flore éparse
dans les traditions de l'antiquité grecque, latine et celtique. Le
hasard voulut que la primulacee rivulaire, baptisée du nom de
samolus valerandi, fût une de mes premières conquêtes. Le sa-
mole, m'exclamai-je, lesamole des Druides ! Transporté de joie,
je cessai sur le champ mon excursion et revins à mon castel, afin
decompulser Pline, D. Martin, Bullet, les Mémoires de l'Académie
celtique et tout ce que j'avais d'auteurs anciens et modernes
traitant des choses de la Gaule. Je ne vous surprendrai pas en
vous apprenant que je me trouvai non moins perplexe après
qu'avant ce labeur de Sisyphe. Attribuant ma déconvenue à mon
très-mince savoir, j'eus recours à un vieux celtophile qui, retiré
 du monde, vivait dans mon voisinage en un modeste domaine.
 Là, tantôt la pèche à la ligne et tantôt la culture d'un jardin
 mêlaient un peu de vie douce à son investigation ardue des