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UNE VISITE. 157
dioses encore dans leur délabrement, nous saisissent d'éton-
nement et d'admiration. Par contre," détruire une inscription,
c'est causer a son pays et à la science, un dommage abso-
lument irréparable ; et si cette destruction, excusable jus-
qu'à un certain point par l'ignorance du délinquant, lors-
qu'elle est commise par un homme sans culture d'esprit, est
le fait d'une ville, non malveillante certainement, mais insou-
ciante ou distraite, et qu'elle s'exerce sur toute une collec-
tion amassée par les efforts et par les soins des générations
précédentes, alors cela devient un acte qui participe a la fois
de la démence et du suicide.
La ville de Grenoble, qui pour se régénérer, se tranfi-
gurer, redresser ses rues, décorer ses places, créer de vastes
espaces, élever de somptueux bâtiments, ne recule devant
ni les sacrifices, ni les obstacles, ne saurait-elle donc trou-
ver, soit dans son Jardin-des-Plantes,, soit partout ailleurs,
un pan de mur où appuyer quelque élégant portique sous
lequel elle abriterait, hors des atteintes des gens malpropres
et dans des conditions convenables d'arrangement, ses ins-
criptions, c'est-à -dire ses archives les plus précieuses, ses
titres authentiques d'une noblesse deux fois déjà millénaire? <
Ce que je viens de rapporter des inscriptions Grenobl ises
n'est encore qu'une partie de leur infortune. Le recoin, de-
puis longtemps déclos, où sont ainsi conservées les archives
lapidaires des antiques Cularenses, offre aux allants et venants
« pressés, » en quête d'un instant de solitude, un refuge
on ne peut plus « commode » pour lequel semblent avoir
été inspirées tout exprès ces paroles mises par Horace dans
la bouche du Priape des Esquilies : In me veniunt miclum
atque cacalum Iulius et fragilis Pedialia furque Foranus
(Sat. 1, 8, 38) et cette supplique au viator gravée sur une
épitaphe antique: HOSPES AD HVNC TVMVLVM NE MEIAS
OSSA PRECANTVR (Orelli, u° 4781.) De telle sorte que, au