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LES ÉPHÉMÈRES, sonnets par Joséphin SOULARY. Voici un poète qui, depuis longtemps, n'en est plus à chercher sa forme ; il l'a trouvée et il lui est fidèle. M. Soulary produit peu et à de longs intervalles, premier mérite qui ne manque pas d'habileté, s'il est le résultat d'un parti pris. L'auteur des Éphé- mères n'est pas de ceux qui n'osent se présenter au public qu'à la tête d'un formidable convoi de poèmes grands et petits. Devant ceux-là qui prisent avant tout la quantité, la critique, pour les juger sainement, est souvent tentée de faire deux parts de leurs ouvrages, et de laisser alternativement un vers pour la raison et un pour la rime. M. Soulary est tout l'opposé de ces partisans de la fécondité à tout prix ; aussi ne livre-t-il cette fois à la publicité que trente-huit sonnets, un peu plus de cinq cents vers, mais cinq cents vers châtiés, choisis, richement rimes, d'une ciselure nette et vigoureuse. Dès les débuts de l'auteur, il était facile de reconnaître dans son vers une tendance à se resserrer et à se concentrer de façon à devenir le moule précis de la pensée. Cet amour de la concision devait mener M. Soulary à choisir la forme poétique la plus propre à condenser une idée et à en détacher nettement le contour. Naturellement, le sonnet a présenté son cadre ; quoique nous ne partagions pas l'opinion de Boileau sur les difficultés du sonnet et que « les rigoureuses lois » aient été dépassées de bien loin par les tours de force des rimeurs modernes, nous reconnaissons que le sonnet a ce grand avantage de comprimer la pensée de l'auteur, d'en réduire l'ex- pression au strict nécessaire et de laisser au lecteur le plaisir de deviner l'auteur et de le compléter.