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DE LA DÉCADENCE ROMAINE. 387 et de cristal, en or et en argent, garnies de pierres pré- cieuses , et changées chaque fois que l'on buvait. 11 cou- ronna ses amis de bandelettes d'or et de fleurs d'une autre saison ; il leur donna des vases d'or remplis de parfums, des chars avec les mules, les conducteurs et les harnais , pour retourner chez eux dans cet équipage. Ce repas fut estimé six millions de sesterces. On joua aux dés jusqu'au lende- main matin. Héliogabale prodiguait pour apophoreta des eunuques, des quadriges, — chars attelés de quatre chevaux, — des chevaux harnachés , mille pièces d'or et cent livres pesant d'argent. On tirait parfois au sort, de manière que chacun pouvait recevoir ou dix chameaux , ou dix mouches, ou dix livres d'or, ou dix laitues, etc. Il introduisit ces usages dans les jeux qu'il donnait, et le peuple s'en trouvait si content qu'il s'applaudissait de l'avoir pour empereur. Il lui arriva souvent d'abandonner à ses convives toute l'argenterie et les nombreuses coupes qui garnissaient la table. Quand on con- naît la prodigalité de son luxe, on peut imaginer la richesse de ces présents. — Mart. n. 37. — Suét. Aug. 75. — Capit. L. Ver. 10 — 5—Lamprid. Héliog. 20 — 21 —'28. Tout n'était pas bénéfice dans ces repas où l'on avait l'hon- neur d'assister. Un jour, Domitien invita les premiers du sénat et de l'ordre des chevaliers, et les fit introduire dans une salle entièrement tendue de noir. Ils trouvèrent a cha- cune de leurs places une petite colonne funéraire, avec leur nom inscrit dessus. Ils furent servis par de jeunes esclaves barbouillés de noir, et les mets qu'on leur présentait étaient ceux en usage dans les funérailles. Les plats et tous les usten- siles de table participaient de cette couleur noire. Domi- tien seul parlait et racontait des histoires tragiques de morts violentes. Les convives , en présence de ce terrible maître et de ce lugubre appareil, ne durent pas avoir un bien grand *