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29"2 DE LA DÉCADENCE ROMAINE. sesterces. Comme on ne trouva pas dans Rome un four assez vaste pour en faire cuire l'argile , on fut obligé d'en cons- truire un tout exprès dans la campagne. Vitellius était encore plus glouton que gourmand : pendant la célébration des sacrifices, on jetait sur les flammes de l'autel les viscères de la victime et des gâteaux de froment. L'odeur sollicitait sa convoitise, et, au risque de se brûler , il retirait du feu les offrandes consacrées aux dieux. S'il passait devant une popine , il y prenait parfois des mets chauds , ou même cuits de la veille et déjà un peu altérés. Malheur aux villes qu'il traversait ! car les principaux citoyens étaient ruinés par les repas qu'ils avaient l'honneur de lui offrir. — Suet. in Vitel. 13. —Plin.xxxv. 46. —Tacit. hist. II. 62. Le plus magnifique de tous ces nobles mangeurs , qui met- taient à profit leur puissance sur tant de peuples divers , afin de faire arriver de partout les substances les plus rares et les plus exquises , fut certainement Héliogabale. Rien ne lui pa- raissait assez cher, et il aimait qu'on exagérât le prix des mets servis sur sa table, disant que cette estimation augmentait son appétit. Il mangea souvent, à l'exemple d'Apicius, des ta- lons de chameaux, des langues de paons et de rossignols, et des crêtes arrachées à des coqs vivants. Sa prodigalité n'était pas bornée a lui seul. Il faisait servir aux habitués du palais des entrailles de rougets , des cervelles de phenicopteres et de grives , des œufs de perdrix, des têtes de perroquets , de faisans et de paons. Mais ce qui est bien plus merveilleux , c'est qu'on remplissait de vastes plats de barbillons de rou- gets , et le contenu de ces plats n'était pas plus économisé que si l'on avait eu affaire a de simples herbages. On va se récrier sur l'impossibilité de rassembler une quantité de rougets , mulli, telle que l'on put composer un pareil service, mais il n'y avait rien d'impossible pour les em-