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406 LA SUAVIOLA. celle infernale race de gendarmes et de douaniers qui ont fait si souvent la chasse à mes pareils et à moi... Oui, je l'ai juré! Si tu ne sais pas ce que c'est qu'un serment, ta le sauras avant demain, pourvu que mes jambes puissent me soutenir el que mon bras m'obéisse... — Je crois, mon pauvre Balafré, que tu es endormi et que tu fais un mauvais rêve. — Eh bien, soil! suppose que je rêve... mais ne tente pas de m'éveiller, car tu n'y réussirais point. Ces paroles étaient peu propres à rassurer Etienne. Aussi avait-il vu avec une profonde inquiétude le soir arriver. Il ne doutait point que la nuit qui aliail commencer ne décidât de son sort. Le souvenir de Stella se mêlait, à la vérité, à ses craintes el les dominait par instant. L'espérance lut revenait alors, et il se persuadait que l'énergie de la jeune fille réus- sirait à le délivrer. Mais elle ignore ma position, pensait-il bientôt ; et, dans le cas où Marco l'en aurait informée, que pourrait-elle pour me sauver, maintenant qu'elle n'a plus son père et qu'elle a ainsi perdu ce qui aurait pu faire son ascendant sur ceux qui vont disposer de ma vie ! Je ne puis donc que prévoir un triste dénouement à tout ceci ; car, si l'on veut me faire acheter ma délivrance à des conditions honteuses, jû repousserai ces conditions, et subirai la mort... Si, au contraire, le chef de l'association qui me retient pri- sonnier veut se montrer généreux et me rendre purement et simplement la liberté, il y aura, parmi les hommes qui sonl là à me garder, des mécontents qui protesteront par l'assassinat contre l'indulgence de celle décision... Ainsi, de toute manière, mon existence est menacée... Telles étaient les réflexions qui occupaient son esprit. Tout, du reste, contribuait à assombrir ses pensées. Au dehors, la pluie tombait par torrents et le vent souf- flait avec rage. Dans la salle où il se trouvait, les objets lui