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332 LA BÉNÉDICTION PAPALE A ROME. des curieux frémissants de joie et d'impatience. En quelques secondes, 3,800 lampions dessinent perpendiculairement les courbes de la coupole, les colonnes et les croisées de la basilique. Une demi-heure après 690 autres lumières coupent horizontalement ces lignes d'un plus vil éclat. Les sainpie- trini chargés de cette difficile mission ne courent pas mais volent tant ils vont vite. 1 faut entendre les hourras, les 1 trépignements, les bravos qui s'élèvent et s'éteignent au sein de cette multitude comme les vagues houleuses de l'Océan, quelques minutes avant une grande tempête. Les plus belles choses de ce monde, les plus douces émo- tions, les plus nobles sentiments ont leur revers : puisse la seconde partie de mon récit profiter a tous ceux qui sont fiers d'être Français et se vantent d'avoir vu la colonne. Mais n'empiétons pas sur les événements. Deux officiers français avaient eu l'extrême bonté de nous inviter à aller les rejoindre sur l'estrade qui leur était réservée. Après des efforts inouïs, Paul et moi nous parvenons au centre de la place. Un étroit passage se présente, j'en profite pour respirer. Bien courte devait être une satisfaction si légitime. Un grenadier italien d'une taille colossale, la tête couronnée du classique et de l'imposant bonnet h poil me saisit par le bras et veut me faire rentrer dans la foule. — « Ne me touchez pas, lui dis-je avec l'air superbe d'un Talma en herbe, je suis Français. » A ce mot mal sonnant, l'Italien me saisit par le collet et me secoue avec toute la juvénile ardeur d'un gamin qui veut faire tomber des fruits verts. Pauvre hère, je me renfermai au plus vite dans un noble silence que je n'aurais jamais dû quitter, recomman- dant mon âme a tous les saints du paradis. — Que signifie cela, s'écria un lieutenant italien qui se trouvait par hasard présent à ce triste mélodrame. —Voyez plutôt, monsieur, comment vos soldats traitent les Français