Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
314                   M. DE MIRECOURT.

« être un jour permis, dit-il, de soulever le voile qui recou-
« vre de doux mystères : nous raconterons alors comment
« Méry a été l'homme le plus aimé et le plus digne de l'être!»
(Méry, 85). Ici le biographe tourne au chandelier ; fi donc !
éclaire-t-on ainsi les amours de son ami?
   La guitare de M. de Mirecourt a une corde spécialement
affectée aux vibrations féminines ; il en tire une note inva-
riable : les femmes sont' des anges de dévoûment, des chré-
tiennes, des saintes. On a vu ce que c'était pour lui qu'une
chrétienne , voici ce qu'il entend par l'épithète d'ange :
« MmB Ingres, dit-il, a été l'ange gardien de son époux
« la bonne cuisine, si estimée de M. Ingres, ne lui fit jamais
« défaut. » (Ingres, 42). Le rôle d'ange gardien consiste
manifestement, pour le biographe, a faire de la bonne cui-
sine. Je traiterai plus loin des goûts culinaires de M. de Mire-
court.
   Rien n'est vrai chez cet écrivain, rien ne se tient h une
juste mesure. Il ne loue pas, il encense ; il ne blâme pas,
il dénigre ; il ne menace pas, il fanfaronne ; il ne pleure pas,
il pleurniche. Dans tous ses pamphlets, à travers une sen-
siblerie déclamatoire, on ne trouve aucune trace de sensi-
bilité véritable. Le cœur ne parle pas. L'homme s'indigne
à froid, s'attendrit à vide. La gasconnade même n'est pas
dans le caractère de ce Lorrain, déplanté de son village.
Sa violence est pâteuse et embourbée. Sa manière de s'at-
tendrir rappelle Ducray-Duminil, interpellant les âmes sen-
sibles pour les prier de vouloir bien jeter quelques pleurs
sur ses héroïnes innocentes et persécutées. Une occasion
s'est trouvée, entre autres, où le biographe a poussé le man-
que de tact jusqu'au dégoût. M. Gérard de Nerval meurt ;
M. de Mirecourt lui consacre, en tête de la biographie de
Ponsard, quelques pages emphatiques entourées d'un filet
noir.