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M. DE MIRECOURT. 307 jusqu'à des détails tels que M. de Mirecourt est pris d'une sorte de remords et se justifie d'avance de cette rage de scandale en l'érigeant en système. « Toutes les fois, dit-il, qu'un homme est monté en « chaire, s'adressant aux masses et cherchant a leur insi- « nuer ses doctrines, nous avons le droit de déshabiller « complètement cet homme et de crier au public : voilà « l'apôtre qui vous prêche, examinez-le, jugez-le ! Par ses « actes, par sa vie cachée, par sa conduite, appréciez « la valeur de ses œuvres ; voyez si ses maximes doivent « être suivies, si sa morale est respectable, si sa philosophie « est honnête. » Si M. de Mirecourt n'était pas un déclamateur qui n'y voit pas plus loin que sa phrase, il s'apercevrait que son raison- nement ne prouve absolument rien. Les opinions d'un homme sont complètement indépendantes de ses actes. Un voleur peut parfaitement prêcher la probité, et de ce qu'il ne met pas ses discours en pratique, en conclurez-vous qu'il faille suivre son exemple plutôt que ses paroles? La conduite pri- vée de M. E. Sue peut ôter du poids à ses doctrines, mais n'influe en rien sur leur plus ou moins de vérité intrinsèque. En outre, si vous établissez une pareille solidarité entre les opinions d'un homme et sa vie privée, il faut, pour être juste, étendre ce système a tous les hommes d'un même parti. Or, si vous dites au public, après lui avoir montré les mœurs légères — selon vous — et les prétendus goûts de luxe de M. E. Sue . « Jugez par la vie cachée de cet homme de la valeur de ses œuvres, voyez si ses maximes doivent être suivies, » la logique vous condamne a terminer de même les biographies de Proudhon, Lamennais, Arago, La- martine. Or, vous avez été contraint de reconnaître la pu- reté de mœurs de ces quatre républicains. Donc, selon vous, leurs doctrines sont bonnes. Avec un pareil système, vous