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LA DAME D'UHFÉ. 239 — Bravo, Isambert, de la morale ! mais c'est charmant, vrai Dieu! — A la jeune épouse de notre ami, et à son heureuse déli- vrance, dit le seigneur de Lupé. — A la dame d'Urfé ! s'écrièrent tous les convives. — A notre chasse de demain ! — A notre heureux retour ! — Silence , mes maîtres , dit le sire d'Epinac ; à la postérité de notre ami ; puisse-t-elle être aussi nombreuse que les sables de la mer et les étoiles du firmament ! — Tu as appris cela de ton chapelain , dit le seigneur de Jarets ; moi aussi, quand je ne bois pas , j'aime à m'instruire. Puisse la dame d'Urfé donner à son époux autant d'enfants qu'en eut le patriarche Jacob ! Qui boit cette santé ? — Moi, moi ! cria-t-on de toutes parts. Le seigneur d'Urfé était pâle et immobile ; il venait de penser à la malédiction de Marguerite, et son hanap tomba à moitié plein devant lui. — Le vin a troublé leur raison, dit le sire de Lupé, ils ne di- sent plus à présent que des folies. — Amis, dit le sire de Chalmazel , nous aurons demain une rude journée à passer , que les ivrognes restent à table et que les vrais chasseurs viennent prendre un peu de repos. — Merci, lui dit tout bas le sire d'Urfé, je ne pouvais pas rester ici un instant de plus. Le lendemain les étoiles brillaient encore que déjà , dans la cour du château, les chasseurs étaient réunis. Quelques cavaliers à cheval gourmandaient les retardataires ; les chevaux piaffaient et hennissaient, les chiens étaient partis depuis longtemps ; tous les yeux tournés vers le perron marquaient de l'impatience ; un seul chasseur manquait, c'était Isambert. Le sire d'Urfé, se glis- sant à travers les corridors, était venu heurter à la porte d'Hir- mantride , et, s'approchant de la châtelaine , il lui demandait avec inquiétude des nouvelles de la nuit. — Allez , messire , dit la jeune femme , vous pouvez encore chasser aujourd'hui , mais demain , si vous m'octroyez ma de-