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60                            JEAN PALEKNE.
jours à Chypre , il s'embarque pour Constantinople. Chemin
faisant, leur navire passe en vue de l'île de Paphos. Pour don-
ner une idée de l'extrême crédulité de Pa'erne, lorsqu'il ne
voit pas les choses par lui-même, nous croyons indispensable de
lui céder ici la parole •. jamais touriste ne fut victime d'une pa-
reille mystification :


    « Il y eut un gentilhomme vénitien, qui me diet, avant mon em-
barquement, que du temps que la Seigneurie de Venise tenait
l'isle, il y fut avec le potestat, et trouvèrent la sépulture de
Venus, où il y avoit quelques characteres, qui avoyent despuis
esté interprétez , et que ce n'estoit point une chose feincte ,
comme l'on pense, mais que véritablement c'estoit une grande
courtisane, et laquelle enfin pour sa beauté fut adorée, comme
déesse. Elle y souloit estre ensepulturée ; car il me dict qu'ils
y avoyent trouvé la teste, qui fut portée à Venise, laquelle ce
magnifique garde bien chèrement (1). »


    Une tempête force le navire à relâcher à Macire en Caramanie ;
après sept jours d'attente, on gagne Rhodes, d'où l'on part pour
Chio. Notre pèlerin trouve fort accortes et mignardes les fem-
mes du pays. Nous ne manquerions pas de faire connaître au
lecteur son panégyrique s'il ne frisait un peu trop parfois l'al-
lure des Cent nouvelles nouvelles. Métellin, les ruines de Troie,
l'île de Ténédos, l'Hellespont, Gallipoli, les îles de Marmara sont
tour à tour visités avant d'aborder à Constantinople. Palerne
passa trois mois dans cette ville, et il donne sur sa physionomie
d'alors des détails du plus haut intérêt. Il étudie l'organisation
du régime turc, et la condition des esclaves chrétiens avec un
soin tout particulier. L'espace nous manque pour donner une
analyse même très-sommaire des divers chapitres qu'il consacre à
la capitale de l'Islamisme. Tout ce que voyait de ses propres


  (1) Celte histoire [-appelle celle de ce phrénologue. qui montrait, il y a
quelques années, avec un saug-frokl imperturbable, deux crânes d'un célè-
bre voleur : l'un lorsqu'il avait sept ans , l'autre lorsqu'il en avait trenle.