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DE
L'ESPRIT DE LAFONTAINE
A PROPOS
t>KS FABLES DE PIERIIE LACHAMBEAUD1E , D'EUGENE MAZELLE
ET DE T H É O P H I L E DUCHAPT.
L'axiome que Boileau a jugé à propos de formuler sur le son-
net serait encore plus vrai, appliqué à la fable ; il se rencontre,
en effet, plus de sonnets sans défaut, que de /fables sans défaut.
Les difficultés de ceux-ci tiennent surtout à la forme, tandis que
les difficultés de celles-là touchent le fond même. C'est la faci-
lité traditionnelle du genre, c'est le vers irrégulier qui a séduit les
innombrables caudataires de Lafontaine. Il est, en effet, univer-
sellement admis que la fable laisse à celui qui la cultive les cou-
dées les plus franches; point de strophes, point d'entrelace-
ments de rimes, point de rhythmes imposés d'avance, rien de ce
qui fait le désespoir des vrais poètes. On peut là rimer à la
journée ?
Quant à l'invention, les fabulistes se sont arrangés de façon
à ce qu'elle ne leur coûtât pas plus d'efforts que la forme. Tout
leur a semblé bon à mettre en fables ; ouvrir un livre de maxi-
mes, un recueil de proverbes, voire un journal, y recueillir la
sentence la plus banale, et l'habiller avec ces costumes fanés qui
pendent depuis des siècles dans le vestiaire des fabulistes ; ap-
peler celui-ci Jean Lapin, et celui-là Rodillard, voilà à peu près
la recette pour fabriquer des apologues. Cela n'exige pas, comme