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                   LE MOIS DE MAI.                        355
Incessamment épanche un suc réparateur,
Et qu'après six mille ans tu nous apparais telle
Qu'au jour où tu sortis des mains de ton auteur.

Cependant, qu'étalant ta féconde jeunesse,
Sans cesse tu renais et refleuris sans cesse,
L'homme sans cesse marche à sa maturité ;
Et pour lui, sur son front, quand les neiges écloses
Ont fait pâlir enfin l'éclat de son été,
Il n'est point de retour vers son printemps de roses.

Pour lui, pour son hiver, nul Mai riant et beau,
Qui, de ses jours éteints ranimant le flambeau,
Dissipe, au pur contact de ses tièdes haleines,
Les frimas par les ans sur sa tête amassés ;
Fasse son sang plus chaud circuler dans ses veines,
Et son pouls sous la chair battre à coups plus pressés.

Il voit, autour de lui, comme des fleurs fanées,
Tomber, tomber toujours ses rapides années,
Et, d'instant en instant, son déclin est plus prompt,
Et chaque jour, sur lui, qui tristement s'effeuille,
Enlève, en se hâtant, une mèche à son front,
Une page à son livre, à son arbre une feuille.

Puis le souffle bientôt, de son squelette usé,
S'échappe, ainsi que fait l'eau d'un vase brisé ;
Puis la tombe engloutit ses restes éphémères,
L'inévitable tombe où s'en vont tour à tour
Chaque siècle et chaque homme, où sont allés nos pères,
Où leurs fds les suivront, où nous irons un jour !

                                         L.-P. D.