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                            Dunette.


                  LA JUNGFRAU.

    Tous les touristes connaissent la charmante vallée d'Interla-
 chen. C'est là qu'un étudiant, venu d'Allemagne, s'arrêta par une
 tiède journée d'automne. Sa démarche était souffrante, et ses
 traits empreints de tristesse. 11 venait de perdre sa fiancée, et
 voyageait pour effacer, par les émotions des choses nouvelles,
 ce douloureux souvenir. Mais son. désespoir résistait à tout. Ce-
pendant , la vue de la Jungfrau, la montagne vierge , produisit
 sur lui un effet magique ;, il la contemplait sans cesse, tantôt pleu-
 rant, tantôt souriant. Enfin, sa raison, déjà fortement ébranlée
 par la perte qu'il avait faite, s'égara complètement. Son imagi-
 nation insensée et portée, d'ailleurs, comme toutes les imagina-
 tions allemandes, aux choses merveilleuses, finit par identifier
la blanche montagne avec sa fiancée ; il croyait l'entendre, et lui
 parlait d'amour. Il disparut tout-à-coup, laissant dans la petite
 chambre qu'il occupait, son sac de voyageur, ses hardes, et
 quelques papiers, archives oubliées de sa douleur et de sa folie.
Les lignes suivantes me sont tombées sous la main.
    « Ils m'avaient dit : Elle est morte, ta fiancée, ta jeune fille ;
pleure, car elle ne te sera pas rendue ! et je n'ai pas cru ces
menteuses paroles, parce que tu m'étais promise, ô ma bien-
 aimée, tu devais être à moi ; je savais bien que tu ne serais pas
 infidèle, et que tu ne me fuirais pas avant le jour de ta pro-
 messe. Aussi, je n'ai point pleuré, et j'ai juré de te suivre dans
les lieux où ton caprice d'enfant t'avait conduite. Je t'ai long-
temps cherchée; un instant même j'ai perdu courage, et j'ai
maudit ton nom, parce que je te croyais parjure. Mais une voix
s'est élevée dans mon cœur, j'ai reconnu la voix de ma fiancée,
et je me suis remis en route. J'ai parcouru les mers, et les mers