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DE LA TABLE DE CLAUDE. 37 juge n'eut, en effet, moins de dignité et ne fut traité par son auditoire avec plus de dédain. J'avoue que cette explication ne me paraît rendre raison de rien ; elle est inadmissible. L'empereur parlant au sénat dans une cause très-grave, avait le droit d'être entendu, et on ne peut établir aucun parallèle entre les Pères Conscrits , écoutant les motifs d'un sénatus-consulte qu'ils allaient rendre et les propos inconvenants de plaideurs mécontents ou impatientés. On n'in- terrompait pas l'empereur dans le sénat. Une autre objection bien autrement forte se présente, l'interpel- lation des sénateurs était un blâme très-offensant, une critique injurieuse de la prolixité de l'orateur impérial, comment admettre, dès lors, qu'on l'aurait consignée très-soigneusement sur la table de bronze ? cette supposition est absurde. Claude aurait-il permis que l'insulte eût été ainsi perpétuée par ce monument officiel ? Il y a une explication bien plus simple, c'est que l'interpellation n'a pas eu lieu, et que dans ces paroles : tempus est jam, Ti. Cœsar Germanice detegere te patribus conscriptis quo tendat oratio tua, l'empereur s'est adressé la parole à lui-même, il pouvait se tenir ce langage, mais il n'aurait pas souffert que le sénat se le permit. Que cette apostrophe de l'orateur à lui-même ne soit pas d'une convenance parfaite, d'accord, mais d'une part les exemples n'en sont pas rares dans les écrivains latins, et d'autre part Claude était un médiocre orateur. Si la table de bronze reproduit d'un bout à l'autre l'interpellation, c'est que les paroles sont de l'empereur et qu'il se les est adressées à lui-même. IV. 11 existe, entre le discours de Claude dans Tacite et la haran- gue gravée sur la table de bronze, des différences et des rap- ports dont l'étude n'est pas sans intérêt ; je dois les indiquer. Quand on s'aperçut qu'une partie du discours prononcé par Claude, manquait à la table de bronze ont dut espérer de la