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484 de mille mondes « le grand ministre de la nature. » J'ai vu la France, j'ai pénétré dans les plus bruyants sa- lons où Paris reçoit les illustres personnages de tout pays ; j'ai interrogé nos temps, et aux discordantes réponses que me faisait la Seine, j'ai compris que nous vivons dans un âge plus contristé que le siècle retoutable dans lequel pleu- rait l'errant Gibelin. Les uns s'efforcent de relever de la poussière l'orgueil non vengé des lis dorés ; les autres ai- ment le présent et donnent leur vie pour le prince qui, dans un rude combat, obtint d'un peuple invaincu la royale cou- ronne des Français; d'autres invoquent la rayonnante liberté qui règne sur les monts helvétiques et qui, en France com- me en Italie, fut le sujet de massacres et d'atrocités. O Lamartine, dans une pareille lutte de sentiments, il est bien difficile de guider sur l'Océan de la vie la nacelle de l'esprit. Qu'il soit pardonné de Dieu et des peuples, s'il n'ose dire la vérité, le chantre qui a grandi dans les chaînes delà pensée, en une région de soupçons et de peurs. Mais toi, du moins tu es né, sur une terre où, interprètes fidèles d'une libre pensée, tes accents volent des lèvres pour fécon- der les intelligences humaines, et tu jettes ta souveraine pa- role sur la grande cité comme te le conseille l'amour de la fraternité, et quand tu es las de ces rudes exercices, alors sur les cimes de la colline natale, tu replies les voiles de la pensée combattue, puis, méditant sur les destins de l'homme, tu façonnes la haute poésie française. Après que les nua- ges agglomérés ont mugi, que la tempête et la pluie ont battu la terre, oh! que c'est un beau spectacle de voir l'arc- en-ciel aux multiples couleurs, inondant de pacifique lu- mière les ^\eux rassérénés ! Souvent avec des transports de joie, je L.JC pris à contempler cet arc brillant, ce ministre d'alliance, et toujours il me parut un mystérieux et angé- lique instrument des sept harmonies, avec lequel la création