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 quelquefois avant, selon l'affluence des baigneurs. Chacun
passe selon son numéro d'arrivée, sans aucune préférence,
sans aucune faveur ; l'égalité commence dès la maladie; on
dirait déjà qu'on se rapproche de la tombe. Aussi, voyez !
nobles et roturiers, comtesses et bourgeoises, laides ou jolies,
jeunes ou vieilles, les noms les plus anciens comme les noms
les plus nouveaux, les noms les plus célèbres comme les noms
les plus obscurs, tous viennent se renfermer à leur tour dans
cette même chaise à porteurs qui vient les prendre au lit tout
enveloppés de laine et la têle couverte d'une toile de taffetas
ciré, pour les conduire dans la piscine sous la douche liquide
ou gazeuse, et les ramener dans leur couche ruisselants de
sueur. Toutes les grandeurs disparaissent, tous les titres s'en
vont! Il n'y a plus que des corps pour le pauvre diable qui
vous reçoit dans cette amosphère, où il s'amaigrit et se tue in-
sensiblement.
   Comme on rirait de soi, si l'on pouvait se voir passer!
Comme on rirait des aulres, si l'on pouvait les rencontrer sur
sa route sans en être vu.
   La société des Eaux est une chose fort curieuse à observer.
Elle se partage en plusieurs catégories. Chaque hôtel a son
cachet, son caractère, son monde enfin. La noblesse chez
Chabaury, l'aristocratie financière chez Boyer, la bourgeoisie
chezBellon. Ici, le faubourg St-Germain; là, le quartier d'An-
lin ; ici, Paris; ici, la province. Parfois il y a lutte entre ces
différentes populations; parfois aussi il y a fusion dans l'in-
térêt du plaisir commun. La guerre est alors interne, sous la
peau. On se reçoit, on se fêle, on se complimente en face ; on
se déchire par derrière ; on se fait des protestations d'amitié,
et l'on se sépare sans se dire seulement adieu, ainsi qu'on fait
après deux ou trois jours passés côte à côte en diligence. Au
Mont-Oore, l'espèce humaine se montre en raccourci, et
comme elle pose sur un plus petit théâtre, on la voit mieux;
on l'embrasse d'un seul regard. Ou retrouve aux Eaux les dif-
férentes démarcations qu'établissent la fortune et le rang <