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447 distinguait entre tous les autres êtres de ce monde. Voilà ce qu'il nous est enfin permis de librement proclamer au XIX e siècle! Mais, ne soyons pas ingrats, n'oublions pas, Messieurs, de rendre hommage à la mémoire de ceux qui nous ont conquis le droit de dire ce que nous venons de dire. Quel est l'ami de la philosophie qui pourrait songer sans respect, sans reconnaissance et sans émotion aux longs et courageux efforts de tous ceux qui ont travaillé à l'émancipa- tion de l'esprit humain? Depuis Socrate jusqu'à Jordano Bruno et Vanini, à travers toutes les périodes de l'histoire de la philosophie, combien ne rencontre-t-on pas d'esprits élevés et généreux qui ont intrépidement protesté contre toutes les espèces de joug auxquelles différentes sortes de pouvoir ont entrepris de soumettre la pensée philosophique ? Combien ont été condamnés et persécutés, combien ont été chassés de pays en pays, poursuivis par tous les pouvoirs et par tous les sacerdoces , combien, enfin, sont morts martyrs de cette cause sainte ? Gomment donc oserions-nous nous appeler sans rougir, les héritiers de ces hommes héroïques, si, par une inconcevable pusillanimité, nous avions le malheur d'hésiter à proclamer ce magnifique et incontestable résultat de leur dévoûment, comme aussi de tous les grands événe- ments des temps modernes? Aujourd'hui, grâce à Dieu, d'un bout du monde civilisé à l'autre, ce long procès entre l'au- torité et la raison, a été gagné par la raison ; car, dans tous les pays civilisés , il y a des hommes spécialement chargés d'enseigner la philosophie, c'est-à -dire, de discuter libre- ment par la raison et au nom de la raison tous les grands problèmes relatifs à l'homme, à Dieu et à la nature sans avoir cependant d'autre mission que celle qui leur a été don- née par la société , c'est-à -dire par l'état qui la gouverne et la représente. Oui, Messieurs, pour quiconque y songe sé- rieusement, le fait seul de l'existence d'une chaire de philo-