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467 qui, produit d'abord dans le cercle universitaire, a ému l'attention la plus vive chez les sommités du haut enseignement, et qui, livré aujour- d'hui au public littéraire, va fournir un ample sujet de réflexions à ceux qui aiment à pénétrer le sens des œuvres capitales de la poésie. C'était une tâche redoutable que celle de mettre à nu les ressorts philosophiques de la Divine Comédie ; il fallait d'abord pour cela bien posséder la notion de la vraie poésie et de la poésie chrétienne en particulier, savoir, que le symbolisme est son essence, quelle est la représentation visible d'un peu de l'invisible idéal ; il fallait en- suite avoir l'intelligence spéciale du symbolisme chrétien, si riche et si profond ; il fallait enfin une connaissance approfondie de cette philosophie du moyen-âge, luxuriante comme son architecture, or- née, comme ses cathédrales, de détails patients tels que n'en creusa jamais le ciseau de l'antiquité, comme elles, fertile en élancements sublimes qui portent Famé à des hauteurs que n'atteignirent ni les frontons del'Acropolis, ni les enseignements de Platon. Ces conditions de savoir et d'élévation d'esprit ont visiblement pré- sidé au travail de M. Ozanam, aidées de cette patience et de cette conscience littéraire si rares à notre époque de livres qui coûtent un jour à faire et qui vivent un jour. Nous n'essayerons pas l'analyse de son ouvrage, il est trop substantiel pour qu'on puisse en réduire les idées à la simple expression d'un article; nous nous contenterons de donner quelques-unes de ses conclusions, satisfait si nous avons inspiré le désir de l'étudier comme il mérite de l'être. Après un tableau largement tracé de l'état de la chrétienté au XIII" et XIVe siècles, M. Ozanam fait ressortir, sur l'ensemble du développement intellectuel de l'Europe, la philosophie italienne pour en fixer le caractère national qui consiste, selon lui, à maintenir dans leur alliancs primitive la tendance morale et la forme poétique. C'est sur cette terre douée de la double fécondité du beau et du vrai, que devait naître la Divine Comédie. En suivant la division que Dante a lui-même adoptée dans son couvre, l'habile commenta- teur cherche quelles sont les idées du poète sur le mal (l'enfer), le mal et le bien dans leur rapprochement et dans leur lutte (le purgatoire), et le bien (le paradis). Dante, certainement, n'a pas tiré de son propre fond toutes les idées qu'il a si magnifiquement