page suivante »
1S2 semble un peu trop à cette théorie du beau idéal qui l'a cho- qué chez nos artistes. — L'idéal n'a rien à faire ici. Quelle intelligence, si haute et profonde soit-elle, peut se flatter de comprendre toutes les modifications, réservées à la société humaine r Ecoule, el taxe- moi de folie, si tu le veux, lorsque, pendant mon séjour à Paris, j'errais dans les rues populeuses, je fus frappé des allu- res âpres et rudes que l'encombrement de la route et la diffi- culté de se frayer un passage imprimaient à tant d'è 1res affairés. Nul ne cède sa place, nul ne dévie de son chemin s'il peut faire mieux. Chacun regarde avec des yeux irrités l'importun qui l'oblige à ralentir la marche. Le moindre retard, le moindre dérangement est considéré comme un vol dont on est prêt à demander compte. Quelqu'un lombe-t-il ? c'est un em- barras, on s'en détourne ; les oisifs seuls s'arrêtent. Le temps, le temps qui fuit en dévorant la vie, qui désorganise les plans les mieux conçus en leur enlevant l'heure propice, voilà l'inexpugnable pensée qui tend tous les cerveaux. Mais de courtoisie, point; de fraternité, pas une ombre; de générosité, inoins encore, s'il est possible. Eh bien! celle hâte, cette gène qui font tourner tant d'esprits à la mauvaise humeur, à l'égoïsme, si on le faisait disparaître ; si des voies plus larges, plus commodes rendaient les relations journalières plus fa- ciles, plus rapides, peut-être, de ce côté, moins d'aigreur et d'individualisme se glisserait-il au cœur de l'homme. Qui sait:' ce que nous appelons mystères de l'hmanité pourrait bien n'être que le résultat 1res explicable des causes les plus sim- ples, et, par cela même, les moins explorées. L'officier, voulant éviter les questions sociales ainsi qu'il avait éludé la question religieuse, se hâta de diriger la conver- sation vers un sujet moins embarrassant. — Méhémet, reprit-il, loi dont l'esprit si positif se plaît à ramener toulcs choses à leur point radical, n'as-tu pas été désireux de converser avec nos savants? — Oui,