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  vue du bien-être général? Ce qui fait la principale gloire de
 l'ancien peuple romain, ce sont moins les palais délabrés qui
 chargent les sept collines, que les arènes, les r o u t e s , les
 aqueducs, les bains qu'il a semés partout sur son passage. Il
 est, à Paris, des quartiers trois fois plus étendus que tout
 Constanline, des quartiers où cent mille individus se pressent,
 se heurtent, se marchent sur les pieds, pataugeant dans une
 boue infecte. Toutes ces créatures ont besoin de circuler r a -
pidement, car elles mènent une pénible vie. N'est-ce pas vrai
 que chacun de leurs instants est compté par la nécessité,
 qu'elles n'existent qu'à la condition de se multiplier par le
travail ? Et pourtant, quel lit avez-vous creusé à ce torrent
 quotidien qui, dix-huit heures sur vingt-quatre, roule, gronde,
 cherchant des issues de toutes parts ? Il lui faudrait des che-
mins spacieux, des débouchés taillés hardiment ; il n'a que
 des fossés étroits et tortueux, que de petites places étranglées,
 la plupart encombrées de baraques. "Votre climat est pluvieux,
votre sol est détrempé, et, quoique la vie soit toute extérieure
chez vous, rien n'y est préparé dans la prévision de ces deux
obstacles a u n e promple circulation. Quelques rares galeries,
courtes, disséminées, sans liaison entre elles, voilà tout ce.
que vous avez. Ya, jeune h o m m e , ce seraient de beaux m o -
numents que des rues couvertes, vingt fois larges comme
celles des quartiers dont je me souviens ; des rues par les-
quelles votre population s'épancherait au lieu de s'entasser,
et qui, aspirant d'immenses colonnes d'air, répandraient un
peu de salubrité dans ces chenils amoncelés que vous nom-
mez des maisons. Il y aurait là de quoi immortaliser un mi-
nistre, même un roi. Et vos architectes ? combien l'art qu'ils
exercent acquererait de grandeur ! Il ne s'agirait plus pour
eux de construire quelques cases mesquines, mais de mettre
la terre, sur laquelle tout un peuple vit et m e u r t , en rapport
avec la condition d'existence de ce peuple. Ami, penses-tu
que je rêve ?
  — Non, certes, seulement je crains que tout cela ne r s s -