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1GS ont traversé la mer, ce n'était que pour détruire les forbans qui pillaient les navires Européens et plongeaient dans l'es- clavage leurs malheureux prisonniers. — Les forbans sont châtiés depuis longtemps, néanmoins vous vous avancez toujours, et nos villes tombent en votre pouvoir les unes après les autres. —Nous n'irons pas plus loin. Les Français ne rêvent point l'oppression de l'Afrique. —Que le bras de Dieu soit avec toi, si lu dis vrai! Ce- pendant, quels projets les retiennent ? vos vaisseaux sillon- nent rapidement les flots et bravent les tempêtes, vous ne sauriez vivre si près du désert ; que faites-vous ici ? —Nous accomplissons les desseins du ciel. Ce rivage n'eut point vu nos uniformes, s'il ne l'avait permis. Peut-être nous a-t-il envoyés pour vous apprendre des choses nouvelles, pour changer vos antiques mœurs. — Ami, reprit tristement le vieillard, l'arabe n'a rien de commun avec vous, si non quelques misères inséparables de la nature humaine. Nous avons probablement commis de grande fautes, car le prophète nous punit, mais tu ne me feras jamais croire qu'il ait choisi les adversaires de sa loi pour nous régénérer. — Il se fit un instant de silence. L'officier réfléchissait aux moyens d'éviter toute controverse religieuse, et con- templait celte figure patriarchale où se peignait une douleur, tempérée par la résignation. Oui, Méhémet, reprit-il enfin une glorieuse mission a été confiée aux enfants de la France. La même loi doit s'étendre un jour sur tous les hommes ; les mille barrières qui les séparent disparaîtront pour les lais- ser s'unir et se confondre. C'est afin d'atteindre à ce but que les Français apportent à leurs frères d'Afrique leurs arts et leur civilisation. — Leur civilisation ? répéta le vieillard en soulevant son front pensif et nuageux, leur civilisation ! cl il fixait sur le lieutenant des yeux animés par un mélange d'éloanement et d'ironie.