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167 peau, transporter leurs mœurs , créer des routes , semer par- tout des traces qu'une postérité lointaine aurait à chercher peut-être. En vain sur sa tête le soleil d'Afrique dardait ses rayons embrasés , il marchait préoccupé de mille pensées où se mêlaient confusément les souvenirs antiques et les inspi- rations de la gloire moderne. Déjà la ville conquise commen- çait à se perdre dans un vaporeux horizon , et l'aventureux jeune homme ne songeait point à l'imprudence qu'il commet- tait en parcourant ainsi, seul, presque sans armes, un pays où il pouvait à chaque pas tomber entre les mains de quel- ques-uns des soldats dispersés d'Àchmet. Il arriva près de l'une de ces citernes autour desquels se sont couchées tant de générations, et si anciennes qu'on ne saurait dire au juste quelles mains les ont creusées. Cinq ou six cha- meaux attendaient qu'un arabe vigoureux eut puisé l'eau des- tinée à étancher leur soif. Un vieillard assis sur une grosse pierre paraissait en être le propriétaire et présidait à l'opéra- tion. Ali, disait-il au jeune arabe, lave les yeux de ces pauvres bêtes, et rafraîchis leurs nazeaux. Nous devons nous montrer humains envers les fidèles compagnons de nos courses et de nos fatigues. — Salut, mon père, dit le français en «'approchant ; que le ciel t'accorde une heureuse vieillesse et te fasse de gras pâ- turages ! — Salut et merci, répondit le vieillard ; puisses-tu vivre en paix avec toi-même , tel est le souhait de Méhémet en échange du tien. — J'espère que ma présence ne t'est point importune. Ton pays est beau, j'ai voulu l'admirer. D'ailleurs la guerre est finie, tu ne dois voir que des amis dans les Français. — Ce qui est arrivé était écrit, répliqua le vieil arabe; il serait mal de murmurer contre la volonté de Dieu ; mais, si notre pays est beau, la France n'est pas moins belle , je pense. -j- Sans doute, la France est vaste et riche. Si ses enfants