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 bien armés et montés par des hommes intrépides, courir sur
les côtes d'Afrique , remplir leur cale de chair noire, et la
 transporter sur un sol étranger, suivant le caprice des colons.
 ïl y avait actuellement, dans le port, un joli brik dont la mâ-
ture élancée et penchée en avant, les sabords bien ouverts,
laissant apercevoir une rangée de canons, nous firent éprou-
ver le désir de le voir de plus près. Il s'appelait laRoxelane.
Nous montâmes donc à bord, Olivier et moi ; nous examinâ-
mes sa mâture, son grément, sa cale, et, après avoir reconnu
qu'on pouvait, avec un pareil coursier, devancer ou fuir en
pleine mer bien d'autres bâtiments, nous nous rendîmes au-
près de l'armateur, et lui proposâmes de nous admettre dans
l'équipage du négrier. L'armateur nous présenta le capitaine
dont la mine étrangère, fourbe et railleuse nous inspira de l'a-
version, puis, ayant su de nous qui nous étions, il me nomma
second du navire, et Olivier lieutenant.
    Chargé par les devoirs de mon grade de former l'équipage,
je fréquentai quelques jours de suite les tripots, les tavernes,
et fil mon choix parmi les matelots qui attendent dans ces
lieux, entre la pipe et le vin, qu'on vienne leur proposer un
 nouvel engagement.
   Lorsqu'à l'aide d'Olivier, j'eus fait les provisions de bord,
présidé au transport de la cargaison qui consistait en boucauts
d'eau de vie, fusils, armes de différentes espèces, poudres de
différentes qualités, je commençai à appareiller, et j'envoyai
un canot chercher le capitaine à terre.
   Il arriva ivre comme le dernier des mousses, monta à bord,
apparut aux matelots avec sa figure de fourbe qui leur ôta, dès
le commencement, la confiance qu'ils devaient avoir en lui,
et, m'ayant donné quelques ordres, il s'enferma dans sa ca-
bine. Oh ! si j'eusse obéi alors à mon impulsion j'aurai jeté
cet homme par dessus le bord, et épargné ainsi tous nos mal-
heurs ; mais si le destin l'a voulu autrement, c'est à moi main-
tenant à vouloir!!!
   Le soir même j'allai mouiller dans la rade, et le lendemain