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20 — Oui, certes ! je suis riche, et plut à Dieu que la mort de quelque ami vint me donner assez de chagrin pour que je fusse obligé de le noyer dans les fétides embrassements de ces femmes, mais c'est le dégoût seul de ces sales orgies qui m'éloigne d'une débauche dont je ne puis être qu'un triste témoin, « Je m'assis à côté de lui. On apporta du vin et notre con- versation continua au milieu des cris et des imprécations des pauvres filles. Les matelots en étaient arrivés à les battre ; car après les avoir vu rire, ils voulaient les voir pleurer. Ces hommes qui payaient tout, désiraient varier leurs émotions. « Mes paroles inspirèrent de la confiance à Olivier. Sa vie qu'il me raconta, et qui était la mienne ; ses désirs, ses goûts que je partageais ; ses projets que je rêvais aussi ; son bon cœur dont le mien avait besoin; la faiblesse de sa constitution qui trouvait en moi un appui ; ce qu'il pouvait me donner et ce que je pouvais lui rendre, toute cette somme de sympathie nous unit d'une amitié forte, sincère et qui devait être d u - r a b l e . Bon jeune homme, il m'aimait autant que je l'aimais. Nous nous étions rencontrés dans ces parages, loin de noire patrie, comme deux arbres d'un m ê m e continent, entraînés par les vagues et les courants, vont se retrouver ensemble dans une m ê m e baie. Dans les rues, dans les tavernes, sur le port, on me vil tou- jours avec Olivier ; on nous appela les inséparables. Nous résolûmes après avoir passé de si bons jours dans le repos et la joie, de chercher fortune ensemble sur un négrier. Des rêves de richesse, de gloire et d'aventures nous bercèrent tous deux. Il nous lardait d'agir, et nous en trouvâmes bientôt l'occasion. Malgré le décret général des nations qui défend la traite des nègres, l'existence des colonies nécessitera encore ce trafic odieux, et les planteurs, dans leur intérêt personnel, favorise- ront, autant qu'il sera enleur pouvoir, ce commerce lucratif pour CUX. On voyait donc encore â Si-Thomas des bâtiments légers,