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 478    •                    FLEURY ÉPINAT.
lieu de département, sans qu'aussitôt la presse ne s'émeuve,
 sans que des Commissions ne se forment pour élever des statues,
 et sans qu'une biographie détaillée n'annonce les mérites du dé-
 funt à l'univers lettré.
    Par une singulière fatalité, un de nos artistes les plus émi-
nents a échappé à ces honneurs, qu'on prodigue si facilement, et
qu'il méritait. Fleury Epinat, qui avait parcouru glorieusement
la carrière des beaux-arts, n'a eu après lui ni biographie, ni
 appréciation de son génie. On peut se servir de ce mot avec Epinat,
il en est plus digne que bien d'autres à qui on ne le dispute pas.
    L'époque de sa mort explique cet oubli. Le 7 juin 1830. la
France, attentive à de grands événements, avait les yeux tour-
nés vers la Méditerranée : les esprits n'étaient occupés que de
la prise d'Alger, tout autre souci était mis de côté. Personne ne
pensait au pauvre artiste qui mourait à Pierre-Scise, dans la
maison de la veuve de Chinard. Quelques semaines après, le
trône des Bourbons s'écroulait. On n'aurait pas eu le temps
de lire une notice nécrologique, il ne se trouva personne pour
la faire.
    Aujourd'hui les esprits ne sont guère moins inquiets, le sol
 tremble encore, mais les agitations des républiques italiennes
au moyen-âge n'empêchaient pas la foule de penser aux beaux-
arts, et nous devons pouvoir mener de front la politique et l'a-
mour de ce qui est beau, comme le faisaient les hommes du siècle
 de Léon X.
    Fleury Epinat naquit à Montbrison, le 22 août 1764. Il était le
plus jeune de douze enfants. Son père, simple menuisier (1),
ne put lui donner une éducation complète, et, malgré les ef-
forts de sa brillante imagination, le peintre habile, l'artiste
de grand talent ne sut jamais réparer ce qui lui manquait de ce
côté. Sa vivacité, sa gentillesse, quelques essais peut-être qui
révélaient l'homme d'avenir, lui firent trouver un protecteur.
Monsieur Thoynet de Bigny, conseiller du roi à Montbrison,

   (i) On l'appelait dans le pays : Père Lépine ; il demeurait à côté du col-
lège des Oratoriens.