page suivante »
164 NAPLES EN 1792 trop ardents du soleil. Les jardins sont pleins d'orangers et de citronniers. La Pouille, la terre de Labour, la Sicile, sont des greniers à bled pour l'Europe. Les vins de Calabre et du Phare de Messine et le Lacryma-Christi, qui se recueille sur les coteaux du Vésuve, sont estimés. Les soies, les laines, les pâtes de réglisse, le lin, le chanvre, sont des objets de grand commerce : peu de pays plus riche en toutes sortes de productions. Aussi la vie animale y est à bon prix, le peuple a peu de besoins, ce qui le rend paresseux. Il est encore grossier, criard, poltron, voleur et superstitieux. Au coin des rues, on rencontre des prêtres perchés sur une chaise, accompa- gnés d'un homme qui porte un grand crucifix et prêchant à qui veut les entendre. On voit souvent sur la même place un joueur de marionnettes faire des farces, un charlatan vendre son baume et un fou débiter Orlando furioso. Le lazzarone achète des macaroni pour un sol (on les vend tout cuits au coin des rues) et il les mange avec les doigts; ensuite il va dormir presque nu sur le pavé. Les femmes portent une mante de taffetas noir qui les couvre toutes entières et facilite les rendez-vous. Les chaleurs du pays sont grandes; on fait généralement la méridienne après dîner. Les boutiques ne s'ouvrent qu'à cinq heures du soir et c'est un proverbe reçu que pendant ce temps on ne trouve dans les rues que des chiens ou des Français. Les rafraîchissements abondent. A tous les pas, des aquaioli, marchands d'eau, en donnent pour trois calli, le verre à la glace. Cette denrée est pour le peuple un objet de première nécessité. Il y a la Dogana délia Neve, et on serait exposé à une révolte si elle n'était pas fournie de glace. L'hyversest doux; on ne se chauffe qu'à des braseros, on voit peu de cheminées. La pluie pendant un certain temps