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            ÉPISODES DU SIÈGE DE LYON EN 1793                     147

surveillés, on leur demandait compte du chiffre des têtes
marquées pour la mort, il fallait parfois pour en compléter
le chiffre, choisir parmi des prisonniers qui n'avaient pas
encore comparu devant leurs juges; la Terreur était soup-
çonneuse et jalouse. De longues suites de charrettes défi-
laient vers les Brotteaux, entourées par des hordes de
volontaires, conduites par des commissaires en bonnets
rouges. Les soldats de la France qui marchaient aux fron-
tières avaient horreur de ces massacres; on leur préférait
les prétoriens de Collot d'Herbois, qui trouvaient leur office
après la mitraillade en assommant les victimes que le feu
avait épargnées. M. de Chappuis en fut un exemple, car il a
été achevé à coups de crosse. Arrivés au lieu du supplice, les
défenseurs de Lyon étaient placés sur une ligne unique
devant une tranchée préparée à l'avance pour leur servir de
fosses. Les canons étaient en face, les massacreurs, le sabre
ou le fusil en main, sur les deux flancs.
   La terre de cette sanglante arène était sillonnée par
plusieurs journées d'exécutions, quand M. de Chappuis vint
y occuper sa place; ses derniers pas durent fouler les ondu-
lations du sol fraîchement remué, huit jours auparavant, sur
le corps de son frère. A côté de M. de Chappuis, était
Rimbert, le général de Montcolomb à la fleur de l'âge, des
vieillards, des prêtres et des artisans; il occupait l'extré-
mité du rang, ses mains étaient liées. Tous attendaient
la mort, le coup n'était suspendu que pour un dernier
effort sur M. de Chappuis; car l'ordre du Comité de la
guerre était pressant, il renouvela sa réponse et ce fut sa
dernière parole (7).


  (7) Extrait des minutes de la Commission militaire déposées au greffe
de la Cour Royale de Lyon.
  Jugement de la Commission militaire qui condamne le nommé Pierre