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lé                  LE LIVRÉ DE RAISON

   Ce fonctionnaire public, qui fait partie de la bourgeoisie
de la ville de Tournoi), où il possède même une maison,
dont il loue une partie à un contrôleur général des Fermes,
a gardé d'ailleurs des habitudes patriarcales, qui nous
révèlent l'esprit d'ordre et d'économie de nos pères. Chaque
année, il achète, pour la nourriture de sa famille, du fro-
ment qu'il fait moudre. Puis, la farine est tamisée à la
maison, dans un moulin à farine, que toute famille dans
l'aisance possédait, autrefois, à la campagne comme dans
les petites villes. C'est aussi, dans sa maison, qu'est
pétri le pain que l'on envoie cuire simplement chez le bou-
langer pour un prix fort minime. Car notre livre de raison
nous apprend que pour une famille, composée pourtant de
cinq personnes, cette dépense est seulement de 8 livres, et
ne s'élève, au plus, qu'à 10 livres 10 sous, pour chaque
année.
   C'est qu'alors, et bien qu'on ne fît encore aucun emploi
de la houille, le combustible coûtait peu de chose. Chaque
année, Antoine-Esprit Bienvenu achète plusieurs voitures
de bois pour son chauffage, à raison de 9 livres la toise
seulement. Et, quant à la cuisine, elle se fait exclusivement
avec du charbon de bois, payé 2 livres et même parfois
30 sous le quintal seulement. ..
   Un autre trait de mœurs, que l'on retrouve dans d'autres
livres de raison, c'est le soin que prenait, dans chaque
procès, le père de famille, de demander une consultation
écrite à un avocat célèbre de quelque Parlement. A cette
époque, en effet, notre législation est encore si obscure et
si embrouillée qu'il faut avoir vieilli dans l'étude du droit,
pour en avoir pénétré tous les secrets. Ainsi procède donc
Antoine-Esprit Bienvenu. Dans un procès qu'il lui faut sou-
tenir contre un habitant de Donzère, berceau de sa famille,