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CHARLES FUSTER IOI Quand j'ai bu la fournaise ou respiré l'encens, Quand j'ai souillé mon âme en coudoyant l'envie, Je vais à cet amour et je m'y purifie, Loin des bravos, loin des appels, loin des passants. Et sans plus m'enquérir de la forme savante, Ni des succès bruyants et vains, ni du moqueur, Je bois l'oubli magique aux lèvres de ton cœur, O mon muet amour, ô ma fraîcheur vivante ! Ou encore, saisi d'enthousiasme pour les frères qui luttent, il s'écrie : Si tu chantes, salut à toi qui vas chanter 1 Chante dans la musique ou chante dans le livre ; Le silence est le poids le plus lourd à porter ; La chanson transfigure et la parole enivre. Si tu souffres, salut à toi, qui vas souffrir ! Pour les cœurs sans remords il est des maux suprêmes, Dont nul, même navré, ne se voudrait guérir, Et que les mieux guéris appelleraient eux-mêmes. Si tu pleures, salut à toi, qui vas pleurer ! Quand l'orgie et l'orgueil se taisent, à cette heure Où l'âme des défunts en nous s'en vient errer, L'homme simple et viril penche la tête et pleure. Et si tu meurs, salut à toi, qui vas mourir ! L'âme doit immoler la chair expiatoire, A la mort qui grandit notre œuvre on peut s'offrir, Et c'est dans les cercueils que se pétrit la gloire. Je félicite aussi M. Fuster de sentir si vivement les charmes de la nature, dont il nous trace des peintures ache- vées. Paysages d'hiver, arbres agités par la brise, vieilles demeures familiales, grandeur majestueuse des mers, horizons mouvants des flots, sont dessinés avec une sûreté