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36 LES DÉMÊLÉS DE SOULAVIE Mais ce qui mettait le théologien hors de lui, c'est l'inter- prétation adoptée par Soulavie, et déjà admise, d'ailleurs, par d'éminents ecclésiastiques comme les pères Nedham et Bertier, au sujet des six jours de la création. Soulavie démontrait, ce qui était la conséquence de ses observations, que ces six jours n'étaient pas des jours comme on entend généralement ce mot, mais des époques d'une durée indé- terminée. Or, ce n'était là rien moins qu'un épouvantable blas- phème pour les oreilles de Barruel, et voici comment sa verve s'exerce aux dépens du malheureux naturaliste : Jusqu'à nos vicaires, tout nous fournit des armes contre le bon Moïse. Je veux vous faire voir jusqu'à nos philosophes en rabat, bra- vant toutes les craintes et les réclamations des vieux pasteurs, déchirant les premières pages de l'historien sacré, forgeant des hypothèses en dépit de Moïse, nous assignant des faits, des faits incontestables, des faits qu'on ne peut croire sans déchirer la Bible, nous montrant des époques et un laps étonnant de siècles avant le premier homme, oppo- sant enfin à l'antique Genèse, la Genèse la plus favorable à nos systé- matiques. Quoi donc ! s'écrieront nos bons croyants, c'est là ce qu'un petit vicaire de village viendra nous proposer comme des faits prouvés, avérés, incontestables, puisés dans les archives de l'univers physique ! Au lieu de repousser les traits lancés par nos impies contre le premier monument de la révélation, il nous débitera tout ce qu'il y eût jamais de plus contraire à l'historien sacré ! C'est donc ainsi qu'une philo- sophie insensée a pénétré jusque dans le sanctuaire !... Et nos prêtres, eux-mêmes, ces hommes consacrés par état à défendre l'authenticité des Saintes Écritures, feront tout leur possible pour les rendre suspectes et nous faire adopter, en place de la révélation, des systèmes tout aussi ridicules qu'extravagants et imbéciles! Non, non, cela n'est pas possible ; M. Giraud n'a pas publié à ce point les prônes et le caté- chisme qu'il faisait dans sa paroisse. Poursuivant son idée, Barruel compare le Dieu de Moïse