page suivante »
62 HISTOIRE DE LA MONARCHIE DE JUILLET Pendant que la campagne des banquets agitait les esprits, plusieurs historiens, Michelet, Louis Blanc, préparaient l'opinion aux bouleversements en réhabilitant la Révolution française ; et l'histoire des Girondins, par son immense succès, plaçait Lamartine à la tête de tous les opposants. C'était peut-être le moment de céder, et de modifier quelque peu notre système électoral et parlementaire. M. Guizot y aurait consenti: le roi s'y opposa. La campagne des banquets recommença. On décida d'en organiser un dans le quartier du Panthéon, alors le douzième arrondis- sement. Cependant, comme l'agitation se répandait parmi le peuple, l'opposition, aussi bien que le gouvernement, en fut effrayée, et dans l'espoir d'y mettre fin on fut d'avis, des deux côtés, de soumettre aux Tribunaux la question de légalité de ces réunions. Il fut convenu qu'au jour et à l'heure indiqués, M. Odilon Barrot et ses amis se ren- draient au banquet; avertis à la porte de la salle par le commissaire de police qu'en se réunissant ils violaient un arrêté du préfet, ils passeraient outre; aussitôt qu'ils seraient assis, le commissaire constaterait la contravention et enjoindrait à la réunion de se dissoudre ; M. Odilon Barrot répondrait brièvement en maintenant le droit de réunion, mais en engageant les assistants à se retirer ; l'autorité judiciaire, saisie de la contravention, prononce- rait sur la question débattue. La question générale de réforme se trouvait de la sorte singulièrement rapetissée; il était d'ailleurs trop tard, le 21 février, les journaux de l'extrême-gauche appelaient le peuple à descendre dans la rue et à manifester en accom- pagnant les députés; une solution pacifique et judiciaire devenait donc impossible : les députés, craignant de trou- bler l'ordre public, renoncèrent au banquet.