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320 LES BIBLIOTHÈQUES DE LYON avec son trésor? Ne les ferme-t-il pas dans des armoires bien closes, qui ne s'ouvrent presque que pour lui et a u - quel le public, dont il se défie, n'a qu'un rare accès. Et comment, dès lors, les vrais lettrés qui auraient besoin, pour leurs utiles travaux, de ces raretés, peuvent-ils savoir seulement qu'elles existent? Si cependant, on leur ouvre ces sanctuaires, quelles transes ne causent-ils pas à leurs égoïstes propriétaires! avec quel effroi ceux-ci regardent ces hommes d'étude, avides de trouver un document longtemps cherché, feuilleter brusquement ces éditions si bien habillées, ou toucher leurs tranches dorées et orne- mentées en creux! Comme ils maudissent ces savants plus soucieux d'une date vraie que des couvertures d'un luxe exagéré, d'un livre souvent sans aucun mérite , mais coté au poids de l'or par des monomanes ! ! Je considère donc ces cabinets comme d'une utilité bien relative pour la science qui ne peut pas en profiter, surtout si leurs heureux propriétaires ne savent pas, par des écrits et des publications, initier le public studieux aux choses impor- tantes qu'ils possèdent ; car le bibliomane souvent n'écrit pas ou ne sait pas écrire, — il se borne à faire des cata- logues, et ces catalogues, qu'il nég'lige de faire imprimer pendant sa vie, se dispersent et se perdent souvent à sa mort ; alors seulement les héritiers chargent un libraire ou un érudit du soin de dresser un inventaire ; le com- missaire-priseur survient, les enchères ont lieu, les ama- teurs arrivent alléchés de tous les coins de la France et même de l'étranger (1), et en quelques vacations ce (1) Londres est aujourd nui le principal marché des vieux livres et des belles éditions anciennes, les prix y sont cependant inférieurs à ceux des marchés de Paris et de Lyon.