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114 VICTOR DE LAPRADE plus vouloir rien entendre : « Je ne servirai pas! » dit-il. Sa résolution est prise. Il gagne la forêt à la faveur de la nuit. « Là -haut, par le vitrail, une figure en pleurs Ecartant le jasmin, s'encadre dans les fleurs. C'est Pernette ! Elle ouvrait la chambre hospitalière Où l'asile est offert à la mère de Pierre. » Eu effet, un ordre de l'autorité avait chassé la pauvre veuve de sa maison que l'on était en train de démolir. Mais la Providence avait mis le remède à côté du mal. La mère du déserteur trouvait un refuge chez la fille de Jacques. Le docteur vient souvent visiter ces deux femmes et leur conter la vie des réfractaires. « Vrai ! Si j'étais moins vieux, j'aimerais cette vie. J'ai tout vu; l'on ne manque de rien. On chasse, on pêche, on dort ; même on boit sur la mousse, Quand le pain se fait dur, on va se promener, Un bon coup de fusil complète le dîner. Puis le docteur, trottant là -bas dans le ravin, N'a-t-il pas au logis quelques vieilles bouteilles ? S'il met dans chaque fonte un armement complet, Deux flacons d'élixir au lieu d'un pistolet ; Si, sous quelques rochers des chasseurs très connus, Il dépose en grimpant les flacons bien-venus, Où donc est le mal ? » C'est très-bien, cela, au contraire. Mais... ce n'est point Pierre. « Et lui? » demande Pernette au malin docteur qui se plait à la faire languir.