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  est seul, il a renoncé à tous, à son père, à sa mère, à ses
 sœurs, aux exigences et aux charmes terrestres delà vie; à
 la joie bruyante pour la méditation ; au bonheur du ménage
 pour le dévouement sérieux aux besoins de tous ; il n'aura
 pas d'enfant et sera privé de leurs caresses, mais il aura les
 malades de son village à soigner et à consoler, les pauvres à
 secourir, les ignorants à instruire; il n'aura pas de femme, et
 souvent quelque souvenir lointain du jeune âge, ou quelque
 tentation mauvaise viendra désoler sa pensée; mais alors
 il trouvera l'étude qui fortifie, la prière qui élève vers Dieu,
 la méditation des lexles sacrés qui ouvre et éclaire un horizon
 sans bornes.
    Luther comprenait le mérite divin de la position qu'il avait
 quittée. Emporté par le mouvement de ses doctrines et de ses
disciples^ il en avait subi les dernières conséquences, mais,
plus d'une fois le remords le tourmenta ; et il ne put retenir
le cri de sa conscience accusatrice.
    Un jour qu'il expliquait à sa femme les merveilles de la
création, il levait les yeux au ciel et lui montrait les étoiles
brillantes : Quelle vive lumière, s'écriait-il, et peut-être elle
ne brille pas pour nous. —Et pourquoi, reprit Bora, serions-
nous dépossédés du royaume des cieux ? — Peut-être, lui ré-
pondit-il, avec un soupir, en punition de ce que nous avons
quitté notre élat. — Il faudrait donc le reprendre, dit Cathe-
rine. — C'est trop tard, c'est trop tard ; le char est trop em-
bourbé.
    Cet aveu échappé dans un instant d'intimité, où le cœur
s'ouvre, où l'orgueil faiblit, où la bonne inspiration du vieil
homme revient sur ses lèvres, nous rappelle la réponse de
Méianchlon à sa mère mourante. Pour plaire à son fils, elle
avait adopté la nouvelle doctrine. Sentant sa dernière heure
venue^ elle tourna les yeux vers lui, et mettant la main sur
son cœur, elle lui dit : « mon fils, es-tu bien sûr que cette
croyance soit la meilleure ; c'est pour la dernière fois que tu
vois ta mère ; cotte vie m'échappe; toi aussi tu mourras et