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93 tire piquante, observation ingénieuse ; voilà tout ce que vous pouvez demander au Lon et naïf chroniqueur, au gentil et malin poète ; mais point de vues d'ensemble, point d'idées générales, point d'avenir. La féodalité s'en allait pièce à pièce, dépouillée de ses prestiges et sapée par la royauté bourgeoise, héritière de Philippe-le-Bel. Déjà , du temps de Froissart, la chevale- rie n'était qu'une parodie, qu'une imitation, un non sens. On le sent bien à l'ardeur et au zèle du pauvre chroniqueur pour ranimer le goût des belles emprises et des merveilleux tournois; maintefois on le surprend à les regretter comme une chose qui s'en va. La féodalité morte, c'en est fait de la littérature féodale et aristocra- tique. Elle a sou dernier écho dans les poésies de Char- les d'Orléans qui sont en même temps le premier mo- nument de la véritable langue littéraire. Est-ce à dire que la littérature indigène est morte et que l'esprit français attend, pour se produire de nouveau, ce que l'on a appelé la renaissance des lettres. Non, entre l'élément féodal et l'élément antique, vit ce que l'on pourrait appeler l'élément bourgeois , l'élément vrai- ment français qui se personnifie dans Villon, dans Com- mines, dans le canevas primitif de la farce de l'avocat Patelin. Villon, c'est le véritable gamin de Paris, \s pro- lotype de cet esprit français, fin, matois, jovial, essentielle- ment satirique, qui se perpétue par succession dans Rabelais, la satire Menippée, Régnier, Boileau et dont Voltaire est peut-être l'héritier le plus légitime. A côté de cette littérature railleuse et légère nous trouvons, au commencement du siècle, les graves et doc- tes discours de Jean Gerson; à la fin, Commines qui nous initie à la prose sérieuse, qui le premier par la