Revue du Lyonnais » série 6 - n°13-16 ( 1924 ) » pp.316

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ques mois que je fis à Lyon l'année dernière, j'eus la satisfaction flatteuse
d'être témoin de toutes parts de l'empressement général pour voir élever
plusieurs para-tonnerres dans cette ville, et je m'y prêtai avec plaisir. Un
de ces conducteurs dont je dirigeai la construction, celui de Saint-Just,
nous présenta au mois de septembre 1780, un phénomène des plus curieux,
et en même temps des plus intéressans pour les Sciences... Le Chapitre
des Barons de Saint-Just, qui s'est toujours distingué par ses vertus et ses
lumières, et qui semble être en possession d'avoir à sa tête des personnes
d'un mérite supérieur, fut le premier à donner l'exemple d'élever des
para-tonnerres. M. de la Croix de Laval, grand Obéancier, dont les con-
noissances dans la Physique et dans les autres Sciences sont très étendues,
a été un des principaux moteurs de cette entreprise, dans laquelle il a été
parfaitement secondé par M. l'abbé Deschamps de la Magdeleine, d'un
zèle et d'une intelligence rares... Le désir de voir la foudre tomber sur
notre conducteur, et montrer ainsi à tous les yeux l'efficacité de ces appa-
reils, étoit cause que j'avois long-temps différé de le completter et d'y
mettre la pointe dans laquelle réside la principale vertu préservatrice de
la foudre. Dans cet état, c'étoit plutôt un conducteur qu'un para-tonnerre ;
et ce conducteur, ainsi désarmé, sembloit autant annoncer la noble con-
fiance que la Physique a dans les moyens qu'elle a imaginés, que défier
la foudre ; car l'extrémité de cet appareil est élevée de 32 pieds au dessus
du faîte du clocher et de 400 pieds environ au dessus des moyennes eaux
de la Saône. C'étoit bien s'élancer dans la région des orages, s'y présenter
sans armes, braver la foudre, et renouveller comme les Titans la guerre
aux Cieux, en entassant monts sur monts, sans craindre le sort d'Encelade
et de ses compagnons. Cette foudre, si ardemment désirée, et si long-
temps attendue, vint enfin dans le temps où l'on perdoit espérance : le
3 septembre fut l'époque qu'elle choisit ; et ce fut un Dimanche sur les
six heures environ après midi, temps où l'afiluence du monde qui revient
des promenades et de la campagne est plus grande ; ce fut le moment
qu'elle parut préférer pour avoir, ce semble, un nombre de Spectateurs
et de Témoins plus considérable. Après une pluie, un vent impétueux,
des éclairs multipliés qui se succédoient rapidement, des tonnerres sans
nombre, plusieurs personnes dont les unes se trouvoient par hasard à