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- 8 7 - sang-froid, à son caractère pacifique, un véritable massacre avait été évité et le sang lyonnais n'avait pas coulé une fois de plus sur cette place des Terreaux que la Terreur en avait inondée peu d'années auparavant. Malheureusement, deux attentats isolés vinrent, dans le courant de l'après-midi, s'ajouter à celui par lequel la journée avait débuté et permettre aux ennemis de Montchoisy de prendre contre lui la revanche dont ils étaient avides. Il appartenait de toute évidence aux administrateurs adjoints à l'état- major d'assurer la police ordinaire de la ville au moyen d'agents spéciaux ; mais il n'était ni possible ni raisonnable d'employer à cet usage les soldats de la garnison : maintenir ceux-ci dans les rues avoisinant la place des Terreaux, c'était aller au-devant de nouveaux conflits de caractère collectif entre la population et l'armée, conflits que le général commandant venait précisément d'éviter de la façon la plus louable. Une fois la place évacuée, des agents de la police municipale auraient donc dû veiller au maintien de l'ordre public et à la sécurité des passants. Mais de police civile organisée, il n'y en avait à peu près point à ce moment à Lyon — et depuis longtemps déjà — pour deux raisons péremptoires : on ne disposait d'aucuns fonds pour la rétribuer et ceux qui auraient été chargés de la diriger en étaient incapables à cause de leur ignorance avérée et du discrédit que nous avons déjà mis en lumière. Aussi, en l'an IV, — et pendant longtemps encore dans les années qui suivirent — des agressions, des meurtres, des attentats de toute nature pouvaient-ils être perpétrés en plein jour sans que rien fût organisé pour les prévenir et les réprimer, la population presque entière, intimidée ou complice, ne faisant rien de son côté pour prêter son concours aux autorités administratives ou judiciaires. Quant à ce qui se passait sou- vent la nuit, c'était bien autre chose : la ville était plongée dans l'obscurité la plus complète, le concessionnaire de l'éclairage public, impayé depuis deux ans, ayant enlevé tous les réverbères ! Dans le courant de l'après-midi et dans la soirée du I er prairial, nul ne veillait donc à la sécurité des rues de Lyon. Les jeunes gens qui passaient pour être affiliés aux « Compagnons de Jésus » en profitèrent pour y circuler en groupes, selon leur habitude, et pour s'y livrer à leurs violences ordi- naires. La rencontre sur leur chemin de quelques-uns de ceux que, dans le