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cousin de Ferdinand Tattet, agent de change à Paris, dont le fils, Alfred,
fut, comme on sait, l'ami intime et fidèle d'Alfred de Musset *.
     Le 24 juin 1814, Louis Tattet (mon arrière grand-père) écrivait à
son frère, marchand horloger aux Verrières Suisses :
     « Nous avons été bien contents de recevoir votre lettre ; l'on craint
toujours qu'il ne vous soit arrivé quelque mauvaise chose, vu que vous
êtes au passage de ces braves (!) Autrichiens. Nous en sommes entière-
ment débarrassés, sinon encore une demi-douzaine qui sont encore ici
à l'hôpital, mais ils ne sont pas à redouter, car ils sont bien pâles. Vous
nous direz si vous êtes débarrassés et comment ils se sont conduits à leur
passage en Suisse. Nous avons, à présent, tous les jours des soldats fran-
çais, il en passe en quantité, — et l'on disait qu'il n'y en avait plus !
Tous les jours, il en passe au moins deux mille à Lyon, qui montent et
qui descendent. Il est venu au moins 80 mille jolis soldats des (manquent
deux ou trois mots par suite d'une déchirure) du matin au soir il arrive des
soldats qui étaient prisonniers en Angleterre qui sont contents d'être
libres, car ils sont bien mal en Angleterre, vu qu'ils n'ont pas la liberté ;
alors que tous les prisonniers qui étaient en France n'étaient pas en pri-
son, ils étaient libres en ville pour se promener, et en Angleterre, ils sont
fermés... ».
     Six mois plus tard, le premier de 1815 (sic), en exprimant « à sa chère
maman, frère et sœur » ses souhaits de bonne année, la femme de L. Tat-
tet, née Cuendet, écrivait, toujours de Villefranche :
     «... L'année passée, nous étions bien dans l'inquiétude, nous appré-
hendions les Autrichiens 2 ... Il circule des bruits que l'Empereur d'Alle-
magne va revenir pour replacer Napoléon sur son trône ; l'on dit même
que sa fille, notre impératrice, est sur les bords du Rhin à la tête d'une
armée, et que déjà plusieurs bataillons de nos armées (troupes royales de

     1. On connaît les vers que Musset adressait, en mai 1832, à son ami Tattet, en lui dédiant La
Coupe et les Lèvres :
               Dans mes jours de malheur, Alfred, seul entre mille
               Tu m'es resté fidèle, où tant d'autres m'ont fui ; etc.
     a. Le beau-frère de Louis Tattet, Laurent Cuendet, qni habitait Beaujeu, avait vu sa demeure pillée
et brûlée par les Autrichiens qui n'avaient eu aucun égard ni pour sa nationalité suisse ni pour la mala-
die à laquelle il devait succomber quelques jours plus tard (Voir : Journal de B. Cuendet, Revue d'Hist,
de Lyon, n° de mars 1914, aux dates du 15 mars et 11 avril 1814).