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— 20 — Tournes ait été séduit par quelques correcteurs allemands qu'il avait dans sa propre maison, soit que, comme cela est plus vraisemblable, il les ait fréquentés dans celle des Trochsels, allemands eux-mêmes, ou dans celle de Sébastien Gryphe, avec lequel il travailla depuis l'an 1530 jusqu'à l'année 1542, — on ne peut pas douter que ce ne fut dans leur société qu'il s'instrui- sit de leur nouvelle doctrine, mais il est difficile de fixer la date de son changement ni de déterminer la secte dans laquelle il se rangea, car pendant plusieurs années il n'y eût que des luthériens en France, et ce ne fut qu'en- viron l'an 1542, lorsque Calvin fut revenu triomphant à Genève, et que ses opinions furent bien connues, que ses sectateurs furent appelés Calvinistes. L'on peut présumer que les persécutions que les réformés éprouvèrent en France, à diverses reprises, durent, par prudence, l'empêcher de manifester son changement, et ce ne fut qu'en 1545 qu'il fit connaître publiquement sa façon de penser par l'impression de la Bible et du Nouveau Testament en langue française, mais si l'on combine ce qu'affirme le père Colonia, qu'il fut séduit par des Correcteurs allemands, avec le temps auquel Commença ce que les historiens français appellent l'hérésie de Calvin, qu'ils fixent à l'année 1534, et qui coincide avec celui auquel Jean de Tournes travaillait chez Gryphe, on pourra en induire, avec quelque probabilité, que s'il avait d'abord adopté les opinions de Luther, il se rangea de bonne heure sous la réforme plus étroite de Calvin qui, après avoir été obligé de quitter Paris, en 1533, s'était d'abord réfugié à Angoulême, puis à Poitiers, qu'il infecta de son hérésie, disent les mêmes historiens, et d'où, par le moyen des livres qu'il publia, de Tournes put aisément s'instruire de ses nouvelles opinions, — alors on en pourrait conclure qu'il fut un des premiers français qui embrassèrent sa réforme, à laquelle et lui et ses descendants ont été Constamment attachés dès cette époque. Ce qu'il y a de remarquable et qui prouve l'opinion avantageuse qu'on avait de lui, c'est que sous le règne d'Henri II, qui fut marqué par tant d'édits rigoureux contre les protestants, Jean de Tournes, bien reconnu pour tel, fut pourvu de l'office d'imprimeur du Roi à Lyon : l'année où il obtint cette place est assez difficile à déterminer ; Maittaire, à l'endroit cité, indique sous l'année 1554 l'Algèbre de Jaques Pelletier in 8° imprimée à Lyon par Jean D. imprimeur du Roi, cependant la Bible latine imprimée la