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246 POÎSSIE. Et toi, tu veux partir! Mais, dis, quelle contrée Garde un baume plus doux à ton âme ulcérée ? Où retrouveras-tu ce bien parmi les biens, L'estime, les égards de tes concitoyens, Et les soins empressés de nos pêcheurs, tes frères? VALETTA. Sur les brisants du cap, un jour, les vents contraires, 11 m'en souvient encor, jetèrent ton esquif : Nous nous levâmes tous pour courir au récif. MARINI. Un dauphin, l'an passé, monstre aux dures écailles, De ton filet tendu rompit toutes les mailles : Nos filles et nos soeurs, pour t'en faire un pareil. Demandèrent, sans plus, huit retours de soleil, Tant la tâche plaisait à leurs mains ouvrières ! VALETTA. Nous t'aimons : cède enfin, oui, cède à nos prières. Puisque tu dois souffrir, souffre avec fermeté, Et ne succombe pas avant d'avoir lutté. MARINI. On voit le matelot, quand la nef est perdue, Des mers, sur une vergue, affronter l'étendue. Ses membres sont glacés; il a soif, il a faim; Et la houle l'emporte, et nulle voile enfin Ne brille à l'horizon déchiré par l'orage. Le ciel même bientôt va trahir son courage ; Bientôt sur l'Océan va se précipiter La nuit, sœur de la mort qu'il ne peut éviter. Il lutte cependant, et si ses mains faiblissent, Autour du bois sauveur ses genoux se roidissent : Car son délire encor, sur la foi des courants, Lui dit qu'il peut revoir la terre et ses parents. SOSPELI.0. Dans mon naufrage, hélas! voilà ce qui me reste, Un stérile délire!..; . MARINI. Et la bonté céleste.