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226 BIBLIOGRAPHIE:. échappé au luth brillant de M. Léonce des Essarts. Cette nou- velle œuvre, Yseult, est pleine de tableaux fantastiques, qui réjoui- raient Hoffmann dans sa tombe ; c'est une fantasmagorie, c'est une étrangeté littéraire dans laquelle un vent fantaisiste passe et repasse, où l'imagination se donne des allures fort pittoresques et des tournures de langage qui ne frisent nullement la banalité à l'eau de rose. Mais entrons au cœur du poème. Voyez-vous là -bas, bien loin, dans ces siècles que les Bardes choisissent de préférence pour leurs créations, comme ayant plus de cachet, plus de couleur, plus d'accent, si je puis m'exprimer ainsi, voyez-vous, dans l'é- panouissement du moyen âge, ce burg allemand , cet ancien castel à physionomie essentiellement gothique que M. des Essarts nous dépeint d'une manière admirable, avec des détails de tou- riste éclairé, amant des vieilles ruines, dont il sait entendre les voix mystérieuses, comme il sait en retracer merveilleusement les sombres et magiques beautés. Voiei la troisième strophe : Le Rhin au pied du burg froisse sa robe verte, Et lui chante en grondant son éternel refrain ; La grand'cour de gazon et de mousse est couverte, Et les salons d'honneur sont vides, et l'airain Ne jette plus au vent ses joyeuses volées ; Seul, parfois le hibou, sous les tours crénelées, Mêle sa plainte rauque au long soupir de l'eau ; Les flots aux murs noircis crachent leur blanche écume; Un ciel gris au-dessus étend sa large bruine Et vient compléter le tableau. Mais de ce fier manoir le plus charmant chef-d'œuvre. C'est ce puits ténébreux que l'on voit tout là -bas, Parmi l'herbe touffue, où la verte couleuvre Auprès du crapaud roux vient prendre ses ébats, Tout à coup s'eritr'ouvrir comme une horrible gueule. Le poète nous a parlé du « vieux burg désert » mais voici qu'un beau jour il y a grandissime fête au manoir, un festin digne tout ensemble de Ballhazar et de Lucullus, au milieu d'un