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146 UNE NOCE. de petits cris de joie et des mouvements ondulés et coquets. C'était là un spectacle charmant, et Louise était si simple, si gentille dans celle occupation champêtre, que Frédéric en fut ravi ; il descendit en courant jusqu'au jardin où il la trouva qui revenait, escortée des paons qui marchaient der- rière elle en se rengorgeant, et de quelques pigeons, à plu- mage moiré de vert et de rose, que la vue de Frédéric alar- ma et fil envoler. — Vous avez effrayé ma cour, lui dit-elle avec enjouemenl. — Oh ! vous êtes une reine bienfaisante, ma cousine, j'ai été témoin de vos libéralités envers votre peuple. — Vous vous êtes donc levé de bonne heure , comme un paysan, répondit-elle, en insistant sur ce dernier mot. — Ou comme un chasseur. Mais, comme vous souriez, je vois que vous êtes sur le point de me prêter, comme hier, des sentiments que je n'ai pas ; vous m'avez jugé sans m'en- tendre, aussi tiens-je à me justifier. — Je regrette de ne pouvoir m'arrôter plus longtemps , mon cousin : j'ai encore beaucoup à faire, car moi je suis une véritable paysanne; mais j'ai, de mon côté, quelque chose à vous dire , et dès que je serai prête , je viendrai vous parler. Après avoir dit ces mots du ton le plus gracieux,.Louise monta le perron et rentra, laissant Frédéric quelque peu ras- suré. Dix heures sonnaient lorsque Louise entra au salon où se trouvaient son père, occupé de la lecture de son journal, et Frédéric qui feuilletait un album. Velue d'une robe de soie gris-clair, coiffée d'un chapeau de lulle, ses belles mains gan- tées de blanc, Louise avait la parure simple êl élégante qu'elle eût pu mettre pour assister à la messe de mariage d'une de ses amies ; délicatesse qu'apprécient vivement les personnes d'une position inférieure qui se sentent heureux de n'être ni