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UNE NOCE. SU affection profondément sentie ; mais je ne puis cependant lui sacrifier les habitudes de mon père que je ne veux pas quitter, le souvenir de ma mère, que je veux cultiver avec amour, et enfin, mon goût pour la simplicité. — Ainsi, c'est un adieu que nous nous disons, sans y être poussés par d'autres que par nous-mêmes ? — Hélas ! dit-elle, mon amour de la médiocrité s'effraie du rôle brillant que vous voudriez lui faire joiier, et vos tendances ambitieuses ne souffrent pas mon humilité et mes aspirations champêtres. — Vous raisonnez tout, Louise, lui dîl-il en lui prenant la main ; mais si nous ne pouvons être qu'amis, lâissëz-moi vous dire que j'aurai toujours la plus grande estime ptiùr * un caractère aussi solide que le vôtre. Et Frédéric, mécontent de Louise, plus mécontent de lui-même, souffrant dans sa vanité et dans ses intérêts, s'éloi- gna pour aller faire ses adieux à M. Girard, sans même voir au bord des paupières de Louise les larmes qu'elle avait peine à retenir. Çjuiïnd M. Girard vint retrouver sa fille, après le départ de Frédéric, il la trouva accablée par cette prostration morale et physique qui sait les grandes émotions. Elle lui raconta en quelques mots comment la route bruyante où Frédéric a<-ait voulu la conduire l'avait effrayée, et son père, qui comprit les sentiments religieux de sa fille pour sa mère et pour lui, et quisenlit,par sa douleur noble et résignée, toute l'étendue de son sacrifice, resta silencieux et profondément remué par l'at- titude courageuse de Louise ; car si ses forces étaient abattues par l'effort qu'elle avait fait pour ne pas laisser percer toute sa souffrance, son âme sereine se reflétait dans un de ces di- vins sourires où s'épanouissent les joies douloureuses d'un triomphe chèrement acheté. — Mon enfant, lui dit-il enfin avec la plus délicate ten-